Romanzo Criminale

 

Un film de Michele Placido

 

D’après le roman de Giancarlo de Cataldo

 

Avec Kim Rossi Stuart, Anna Mouglalis, Pierfrancesco Favino, Claudio Santamaria, Stefano Accorsi, Jasmine Trinca

 

Le cinéma italien ne se limite pas à Nanni Moretti et connaît depuis quelques années un nouvel essor et un renouveau que l’on attendait depuis longtemps, lorsque les maîtres italiens rivalisaient avec leurs pairs américains et français.

 

Romanzo Criminale, tiré de l’œuvre éponyme de Giancarlo de Cataldo, est une fiction librement inspirée de l’histoire des années de plomb et de la bande de la Magliana, qui régna sur le Rome des bas-fonds, dans les années 70-80.

 

Une bande de jeunes donc qui décide de régner sur la ville la plus importante d’Italie, en prenant le pouvoir avec violence, à travers la drogue, les meurtres, la prostitution… Le récit d’une ascension et d’une lente descente aux enfers dans un milieu qui ne pardonne rien.

 

Placido a choisi d’adapter librement et non de relater la vraie histoire de cette bande, difficile de déceler donc et d’associer l’histoire à la réalité, pourtant le cinéaste a choisi de ne pas occulter les faits majeurs de cette époque (enlèvement et assassinat d’Aldo Moro, l’attentat meurtrier de la Gare de Bologne en 1980…), qui faisait de l’Italie un pays où la violence, qu’elle soit de la mafia, des bandes organisées, des anarchistes gauchistes ou néo-fascistes, menait à la mort, était quotidienne et meurtrière.

 

A travers le destin de cette bande et de leurs méfaits, il raconte l’histoire de l’Italie, sa corruption et sa violence.

 

A travers le portrait de ses « leaders » successifs, marquant une époque particulière de l’histoire de la bande, ces jeunes hommes grandissent, s’aguerrissent, mûrissent aussi. Le Libanais, Le Froid, Le Rat, Le Dandy, tous prennent des pseudos pour être identifiés, connus, reconnus aussi.

 

Placido signe un film sombre et extrêmement violent, moralement et physiquement. Par moments, il joue avec le spectateur pour lui faire exprimer quelque sympathie envers ces hommes, pourtant monstrueux. Aucune loi, si ce n’est celle de l’honneur, pourtant bafoué à maintes reprises par les uns et les autres.

 

Le réalisateur italien a souhaité nous faire vivre de l’intérieur le quotidien d’une bande de criminel, poursuivie par la police, en proie à des dissensions internes causées par la cupidité, les luttes de pouvoir. Car aucune amitié ne résiste à cela, aucune relation non plus.

 

Baignant le film dans les titres phares des années 70, Placido ressuscite une époque, un milieu politique et un climat oppressant. L’espoir n’y a que peu de place, tout comme l’amour, qui ne résiste pas à la violence, à la destruction, à la drogue et au crime. D’où ce Romanzo Criminale, une romance qui naîtra et mourra avec le crime, avec la bande.

 

La réalisation de Placido est efficace, rythmée, la photographie particulièrement appliquée. L’insertion d’images d’époque, extraites des journaux télévisés ou de reportages renforce le récit un peu plus encore.

 

Pour incarner tous les personnages, Placido s’est entouré des meilleurs comédiens italiens : Stefano Accorsi, toujours impeccable, incarne le policier à la poursuite de la bande ; Kim Rossi Stuart est Le Froid, personnage central du film, dont le parcours est le plus atypique et dont le regard magnétique lui vaut son surnom. A leurs côtés, on remarquera Anna Mouglalis, touchante dans le rôle de la prostituée, mais aussi la jeune Jasmine Trinca, révélation du film, déjà remarquée dans La Stanza del Figlio, de Nanni Moretti.

 

Romanzo Criminale se veut être le récit d’une époque, que l’on aimerait voir révolue, mais qui n’a jamais complètement disparue.

 

Si le film ne révolutionne pas le genre, Romanzo Criminale est une œuvre solide, bien réalisée, qui vaut surtout pour ses comédiens et la force de son récit.

 

A voir, pour découvrir aussi le cinéma italien sous un autre regard.

 

Arnaud Meunier

27/03/2006